dimanche 31 mars 2013

Eric Legnini : « Sing twice ! »




Le prolifique et talentueux pianiste belge est de retour avec un nouvel album, « Sing Twice ! », le troisième en autant d’années. Après son dernier effort instrumental, ce disque marque le retour d’Eric Legnini vers un jazz vocal grâce aux collaborations avec le chanteur Hugh Coltman (sur trois titres) et les chanteuses Namani Keita (deux titres) et Emi Meyer (un titre). Chaque voix marque ce disque de son empreinte, qui s’il reste foncièrement jazz prend parfois des atours pop. Dans cette optique, les trois titres chantés par Hugh Coltman sont clairement pop et Hugh, dans un registre nouveau pour lui, joue l’atout charme du crooner. Namani Keita incarnerait plutôt l’Afrique et le retour aux sources, dans la lignée du travail entamé par le pianiste sur l’album « The vox ». Enfin, « Winter Heron », titre né de la collaboration avec l’Americano-Japonaise Emi Meyer, abat une carte folk et acoustique. Si la formule en trio (piano, contrebasse, batterie) reste le cœur de la musique d’Eric Legnini, ce dernier ne s’interdit pas quelques écarts, histoire de varier un peu les plaisirs. L’utilisation de cuivres, de claviers vintage (fender rhodes) et d’une guitare électrique apporte une note plus funky, plus marquée par les années 1970, rappelant Stevie Wonder. Enfin, la session est complétée par quatre compositions instrumentales, notamment la très belle « Cinecittà », double hommage d’Eric à l’Italie originelle mais aussi à l’art cinématographique. Une réussite supplémentaire dans la carrière de cet artiste talentueux et attachant.  

samedi 30 mars 2013

The Boogie Ramblers : « The Lack of blues is the root of all evil »




Les Yellow Dogs séparés (provisoirement ?), il n’aura pas fallu très longtemps au chanteur/guitariste Yannick Dorel pour rebondir avec sa nouvelle formation The Boogie Ramblers. Si la note est toujours et encore bleue, ce nouveau groupe marque une évolution dans la musique de Yannick. Les Yellow Dogs étaient un power trio très influencés par la scène british boom et le son des années 1960/1970. Les Boogie Ramblers approfondissent encore plus les influences. Nouveau line-up, une contrebasse et un harmonica font leur apparition, une batterie et Yannick au chant et à la guitare complètent la formation. La contrebasse apporte un swing nouveau et le son se rapproche encore plus des origines, il y a quelque chose d’assez fifties dans cette approche. L’harmonica amène de la diversité et permet d’échapper au sempiternel solo de guitare. De fait, la guitare se concentre essentiellement sur le rythme, le shuffle (exception faite de « Teeny bit of your love »). Pour bien saisir les différences il suffit d’écouter « Cheap beer and shuffle » puisque la chanson a été enregistrée par les deux groupes. En bon adorateur de blues, et plutôt doué qui plus est, Yannick et son nouveau groupe ont, une fois de plus, sorti un bon petit maxi (8 titres) joué et enregistré avec passion. Comme ils le disent si bien eux-mêmes le manque de blues est la racine de tous les maux, alors vous savez ce qui vous reste à faire…
En téléchargement libre :
http://boogieramblers.bandcamp.com/ 

dimanche 24 mars 2013

Duel : Vertiges #2




L’aventure de Julien Boulfray et Brieuc Carnaille continue avec ce deuxième maxi, « Vertiges #2 » (Rappelons que dans le but de fidéliser son public, Duel s’est mis en tête de sortir un nouveau maxi chaque trimestre). Ce nouvel EP de quatre titres commence avec l’excellente « Hey, tu ne me manquera plus », véritable tube pop en puissance que l’on avait découvert sur l’ep précédent. C’est hélas pratiquement le meilleur moment du disque. Les trois titres suivants les voient continuer leurs expérimentations, lorgnant cette fois vers la french pop des années 1980. Beaucoup de synthés donc, des boîtes à rythmes et peu de guitares de ci de là. Si l’objectif était de faire un disque rétro, c’est alors parfaitement réussi. Si vos oreilles n’ont pas gardé un bon souvenir des années 1980, dans ce cas la déception est au rendez-vous. C’est dommage dans la mesure où Duel possède des qualités d’écriture, tant pour la musique que pour les textes, plutôt intéressantes. Sans ces encombrants arrangements, certaines chansons auraient été très réussies, « Les roses de la nuit » notamment. Moins marquée par les eighties « L’aurore » clôt cet ep mi-figue, mi-raisin sur une excellente note, avec toujours cette impression tenace que ce groupe est capable de beaucoup mieux.

jeudi 21 mars 2013

Hifiklub + The Legendary Tiger Man : « Ghost of Nico »




Après Brian Wilson (voir le post d’hier), les français d’Hifiklub continuent de présenter leurs hommages aux géants du rock s’attaquant cette fois au répertoire de Nico, ex-mannequin Allemand et ancienne égérie du Velvet Underground dans les années 1960. Pour l’occasion, Hifiklub reçoit un renfort de poids en la personne du Legendary Tiger Man (a.k.a Paulo Furtado, fantasque leader des géniaux Wraygunn). Ces quatre titres commencent de la meilleure des façons avec « One More Chance » morceau au tempo lent et aux guitares hypnotiques, grand numéro de charme de Paulo qui chante avec une voix lascive (quel chanteur tout de même !). On pourrait en dire autant de « Femme Fatale » (une des meilleures chansons jamais composée par le Velvet), qui poursuit dans la même lancée et prolonge cet état de grâce. Une rupture de ton s’opère dès la troisième plage « Win a few », plus expérimentale et aux guitares abrasives. Une approche noisy dans la plus pure tradition New-Yorkaise qui rappelle un peu un autre groupe mythique de la grosse pomme, Sonic Youth. Enfin, « It was a pleasure then » clôt cette session sur un mini tour de force de 6 minutes. Bien fait, respectueux de la tradition du Velvet tout en réussissant quelque part à réinventer la musique du velours underground, voici un bon petit maxi, bien sympathique.  

mercredi 20 mars 2013

Hifiklub : « Smiled »




C’est à l’occasion d’une exposition sur Brian Wilson, que les français de Hifiklub ont enregistré ce maxi de trois titres en hommage à « Smile », l’album maudit des Beach Boys. Et le titre et la pochette sont un décalque malin de l’œuvre originale. On pourrait en dire autant de la musique. Des Beach Boys, Hifiklub a gardé l’esprit et modernisé la lettre. Le chant est soigné, autant que dans l’original. La musique a subi un sérieux lifting, on a bien affaire à un disque du 21ème siècle pas une pale copie des années 1960. C’est particulièrement vrai sur « Mrs O’Leary’s Cow », tour de force de 10 minutes pour moitié constitué de manipulations sonores et autres bruitages électro avant que les guitares n’entrent en action. Pouvait-on rendre un plus bel hommage au génie de Brian Wilson ? En prime deux réinterprétations de « Vega-tables », l’une très réussie et l’autre à cappella plus proche de l’originale. Les reprises sont réussies dans la mesure où elles réinventent les morceaux originaux. A découvrir.

lundi 18 mars 2013

Lady




Lady, c’est la rencontre fortuite de deux voix. Celle de l’anglaise Terri Walker et de l’américaine Nicole Wray. C’est aussi un coup de cœur immédiat. Duo sans leader, Terri et Nicole s’échange les rôles avec bon cœur, à toi à moi, le lead ou les chœurs. Signé sur l’excellent label de Brooklyn, Truth & Soul, un des meilleurs à l’heure actuelle en matière de soul avec les cousins de chez Daptone, Lady sort son premier album, très attendu après les premiers extraits diffusés en fin d’année dernière, avec l’aide du groupe maison, The Expressions (ceux là même qui accompagnent habituellement Lee Fields). On a beau en avoir l’habitude, on reste une fois de plus pantois devant le résultat. Lorsqu’elle est jouée avec autant d’amour et de passion, il est tout simplement impossible de se lasser de cette soul music estampillée 60s/70s. Les voix des deux chanteuses sont magnifiques, et pour le coup, véritablement soulful, des frissons vous parcourent la colonne vertébrale à l’écoute. Les émotions se bousculent. Musicalement, le rendu est impeccable, le niveau de finesse des arrangements, cuivres, cordes, harmonies vocales est hallucinant (« Karma »). Le disque pulse à point servi par une section rythmique pleine de groove, avec en prime des percussions que l'on jurerait tout droit sorties de chez l'immense Curtis Mayfield. Entre autres réussites citons notamment « Good lovin » qui s’éloigne un peu de la tonalité Motown de l’ensemble, pour un son plus psychédélique. Une impeccable réussite.
http://truthandsoulrecords.com/artists/lady/

dimanche 17 mars 2013

Séquence 8, Casino de Paris, 16 mars 2013.




Quatre ans après son dernier passage dans la Capitale, la très athlétique troupe Québécoise les sept doigts est de retour avec sa nouvelle production « Séquence 8 ». Huit, comme le nombre d’artistes présents sur scène, chacun ayant droit à une séquence le mettant en vedette. Sur un fond musical choisi avec soin, les danseurs/acrobates/gymnastes se donnent en spectacle avec une impressionnante intensité de tous les instants. Séquence 8, c’est de l’acrobatie de haute volée. Les danseurs et danseuses, évoluant avec grâce, lancent un défi constant aux lois de la gravité et de l’attraction terrestre. Un festival de salto sur balançoire, de trapèze ou un stupéfiant numéro sur un trampoline/barre. Les risques encourus font froid dans le dos. Plus d’une fois le public reste stupéfait cloué au fauteuil. Les mélomanes apprécieront le numéro de percussion chorégraphié à partir de cubes. Absolument renversant.

samedi 16 mars 2013

Duplex + Elliott Murphy & The Normandy All-Stars, New Morning, 15 mars 2013.




Voici venu le temps du pèlerinage annuel au New Morning pour fêter l’anniversaire d’Elliott Murphy… Mais comme l’année dernière, la soirée commence avec Duplex, le groupe mené par son fils Gaspard Murphy « surexcité mais un peu stressé », auquel il revient l’honneur d’assurer la première partie. Depuis un an, on avait eu peu de nouvelles de Duplex. Les musiciens mûrissent tranquillement leur projet qui a beaucoup évolué. Déjà comme le dit Gaspard : « On a pris des cours de piano ». De fait deux synthés ont fait leur apparition et apportent une touche à la fois pop et électro. Les deux guitaristes se faisant parfois face chacun sur son clavier. Pourtant Duplex reste un groupe de rock français (car Gaspard chante dans la langue de Molière), les guitares ont pris de l’épaisseur, le ton général s’est durci. Le batteur Tom en particulier n’avait pas fait une aussi forte impression il y a un an. L’assise rythmique est phénoménale, plus rien n’arrête le groupe ainsi lancé. Comme chez les Smashing Pumpkins, une jeune et jolie jeune fille tiens la basse avec beaucoup de talent. Plusieurs nouvelles compositions, assez chouettes, et comme l’an dernier, une reprise de Bruce Springsteen pour finir, le groupe jette cette fois son dévolu sur « Adam raised a Cain ». Grosse débauche d’énergie, c’est donc en nage que nos musiciens quittent la scène avant de revenir remballer le matériel, car c’est un peu le destin du rocker, devenir une superstar ou porter son ampli soi-même… Duplex un projet en voie de maturation auquel il ne manque plus qu’une sortie discographique pour valider le chemin parcouru en un an. Pour bientôt peut-être, on l’espère en tout cas…

On retrouve ensuite le papa, Elliott comme d’habitude entouré de ses musiciens français, le Normandy All-Stars, soit le guitar-hero Olivier Durand, Laurent Prado à la basse et le batteur Alain Fatras. Mine de rien, Elliott s’apprête à sortir son quarantième album, « It takes a worried man », ce qui au final donne la moyenne insensée d’un album par an depuis ses débuts en 1973. Incroyable. Compositeur fin et lettré (également auteur de plusieurs romans) Elliott Murphy est toujours autant marqué par Bob Dylan et évolue dans un registre un peu similaire entre folk et rock n’roll. Plusieurs nouvelles compositions furent jouées, avec toujours, cette qualité de composition qui le caractérise. On retrouve avec beaucoup de plaisir les classiques anciens « The last of the rock stars » ou plus récents « Take that devil out of me ». Pour la nouveauté, cette année on a enfin eu la confirmation que le groupe sait danser. Sur la fin Gaspard vient rejoindre son père sur scène et se lance dans de formidables chorus de guitares en duo avec Olivier. Le concert se termine dans un unplugged absolu, avec un chouette morceau country, Olivier à la mandoline (c’est une nouveauté) et une reprise magnifique de Neil Young : « Rockin in the free world ». L’avantage quand on a une notoriété assez réduite, comme Elliott, c’est de pouvoir entretenir des relations humaines avec ses fans, les salles sont de taille raisonnable, le public (souvent des habitués) répond présent chaque année et est particulièrement réceptif. Le concert se déroule dans une ambiance bon enfant, l’audience est comme emballée dans une sorte de vibration collective, on lève les mains en l’air, on danse. C’est beau de voir un type fêter ses quarante ans de carrière et rocker comme au premier jour. A des années lumières de ces performances ou le professionnalisme prime pour ne laisser aucune place à l’émotion. Ca fait du bien. Conseil, réservez votre week end pour l’année prochaine.
https://www.facebook.com/duplexduplex


jeudi 14 mars 2013

Mankoora : « El Loco »


Premier quarante-cinq tours pour ce groupe. La face A, « El loco », à peine commencée, la température grimpe rapidement pour atteindre des valeurs affolantes. Mankoora donne dans le funk (instrumental) latin. Au programme donc, des orgues complètement folles, des percussions au sprint avec quelques coups de cuivres pour la bonne mesure. La face B, « Boogaloo Tormenta », est à peu près similaire et commence par une affolante intro au piano. L’influence du jazz se fait sentir sur les deux titres par le biais de soli de trompettes bien sentis et dans la construction générale des morceaux. Bien que respectueux d’une tradition funk héritée des années 1970 et les deux faces sont animées d’une dynamique bien de notre époque. C’est chaud !

mercredi 13 mars 2013

Edwyn Collins : « Understated »




Auteur d’un tube mondial, « A girl like you » en 1994, l’Ecossais Edwyn Collins est de retour avec un nouvel album « Undrestated ». Rien que du très classique me diriez-vous ? Sauf que dans l’intervalle, victime d’un AVC en 2005, on a bien cru Edwyn Collins perdu pour la musique voire même la vie tout court. Bien au contraire, c’est un Edwyn remonté comme une pendule et plein de projets tout azimut que l’on retrouve. L’épisode n’est cependant pas occulté et fait l’objet d’une chanson absolument déchirante « Forsooth » ou Edwyn proclame son amour de l’existence sur une mélodie qui n’est pas sans rappeler « Sunday Morning » du Velvet Underground groupe qui « a changé ma vie à 15 ans »*. C’est symptomatique de ce disque, le monde change tout autour, Edwyn reste attaché à certaines valeurs : « Les refrains sont très importants pour moi. J’aime avoir des hooks, des accroches mélodiques »*. Ce disque se présente donc comme un album à l’ancienne, celle d’un songwriter maîtrisant ses classiques sur le bout des doigts. A titre d’exemple, les meilleurs plages sont certainement « Carry on, carry on » et « Too bad » aux accents Motown. Varié, du rock n’roll, de la pop, de blue eyed soul, un soupçon de country, « Down the line », l’album ne souffre absolument pas de ce classicisme, c’est au contraire un gage de qualité. D’un bout à l’autre, la voix de crooner d’Edwyn Collins, miraculeusement épargnée, trône au dessus de la mêlée et semble mue par une force inébranlable : celle de la vie.
* Propos recueillis le 1er mars 2013.
www.edwyncollins.com

mardi 12 mars 2013

The Spinto Band + Duel, Le Point Ephémère, 11 mars 2013.




Présent en première partie Duel (dont on avait évoqué le premier ep ici) illustre bien la difficulté de chroniquer les artistes en développement. Le duo de guitaristes/chanteurs, formé de Julien et Brieuc, est pour la scène renforcé par un troisième membre préposé aux claviers, samples et boîtes à rythmes. Toujours en gestation, le projet n’a pas encore de contours biens définis. Duel, cherche, expérimente et cela s’entends. Si on peut parfois regretter l’importance prises par les boucles sonores et la rigidité imposée par l’utilisation d’une boîte à rythme, la musique de Duel révèle pourtant parfois des moments d’une évidence mélodique limpide : « Caramel », « Mourir au combat » ou le tube en puissance « Hey tu ne me manqueras plus ». C’est finalement lorsque l’accent est mis sur les guitares (une acoustique et une électrique) que l’on apprécie le plus le duo. Dans ses meilleurs moments, Duel emporte littéralement l’auditeur dans une virée onirique au pays du son. A noter également une excellente reprise du « There is a light that never goes out » des Smiths et Dieu sait qu’il n’est pas aisé de se glisser dans les pénates de personnalités aussi fortes que Marr et Morrissey. Une prestation en demi teinte donc, pas dénuée de qualités, loin s’en faut, mais la formule n’est pas encore complètement rodée, simple question de temps.

C’est ensuite avec un plaisir non feint que l’on retrouve The Spinto Band, quintet (guitares, basse, claviers, batterie) originaire du Delaware (suffisamment rare pour être souligné). On pourrait croire que le Spinto Band, parce qu’il pratique un univers coloré et enfantin où se côtoient kazoo (« Brown Boxes ») et mandoline (« Oh Mandy ») et s’amuse à reprendre « Brazil », est un groupe pop gentillet. Erreur fondamentale. Certes, la pop du groupe est colorée, fun et toujours optimiste. En studio. Tel un iceberg, une fois sur scène, le groupe révèle une face immergée bien différente. Celle d’un groupe de rock indé redoutable boosté par une section rythmique à toute épreuve. Dôté d’un jeu de scène assez expressif, Thomas Hughes à la basse est d’une précision sans faille. Son approche de l’instrument est pour le moins originale mais efficace. Derrière sa batterie, Jeff Hobson frappe ses toms avec une impressionnante puissance, assez inattendue. Et le fait que le groupe ait perdu un guitariste, ils ne sont plus que deux contre trois précédemment, n’a en rien altéré cet aspect rock. « Late » ou « Direct to helmet » sont quasiment garage/punk. C’est aussi avec grand plaisir que l’on a retrouvé le tube inusable « Oh Mandy », dans une nouvelle version sans mandoline mais axée sur les guitares, qui en huit ans n’a pas pris une ride. A noter aussi les chouettes harmonies vocales du groupe. Enfants naturels de la scène power pop indé des années 1990 (Nada Surf, Weezer, Spoon, Death Cab for Cutie etc…) The Spinto Band prend la relève avec beaucoup de classe.   

dimanche 10 mars 2013

Interview avec Yann Destal


(c) Nadia Gric




Leader de Modjo à la fin des années 1990 avec un tube dance à la clé, « Lady » en 2000, Yann Destal s’est lancé en solo en 2004 avec son album « The Great Blue Scar » qui fût un échec commercial. Depuis Yann a plus ou moins disparu des radars et tente de revenir à son inspiration première, la pop et le rock des années 1960 et 1970… Rencontre avec un phénomène…

Ton précédent album date de 2004, que s’est-il passé depuis ?
Yann Destal : Pour moi, ce disque c’était le début de mon projet en solo. Le disque n’a pas été un succès commercial, loin de là. Depuis je me suis séparé de ma maison de disque de l’époque, j’ai renoué avec « la musique sans référent », c'est-à-dire sans personne à qui devoir rendre des comptes.

C'est-à-dire ?
YD : Quand tu es signé, tu fais ton morceau après ton directeur artistique l’écoute, on te donne un avis ensuite tu parles avec quelqu’un d’autre… De fil en aiguille tu dialogues avec des gens, ce qui peut être bien mais pas toujours. Et le dialogue n’est pas forcément artistique. C’est cliché mais c’est ce que j’ai vécu. La séparation avec le label s’est bien passée, d’un commun accord. Je crois que l’on était tous contents de se libérer. Pendant un temps j’ai apprécié de refaire de la musique, je n’ai jamais cessé d’enregistrer, j’ai mon propre studio. J’ai eu besoin de me retrouver intérieurement, de renouer avec le but premier de la musique à savoir un mode d’expression personnelle. Un plaisir. Parfois le système dans lequel on est poussé, peut détourner de l’artistique à la longue. Moi j’ai apprécié pendant quelques années d’en être débarrassé. Depuis, j’ai fini par rencontrer des gens, ma manageuse, l’agence de presse, avec qui j’ai le sentiment de vivre quelque chose d’humain ; l’artistique est préservé. J’ai eu aussi besoin de reconnecter avec le public. De refaire surface.

Parlons musique, quelle est la part d’expérimentation dans ton travail ? Tes morceaux sont en général très produits, les arrangements sont très précis, comment ça se passe ? Je pense à « You know me » en particulier…
YD : C’est assez bizarre, chaque morceau à son propre scénario. Bon parfois le scénario n’a rien de spectaculaire. Pour « You know me », c’était assez rigolo, au départ on m’avait demandé un instrumental pour un autre artiste. Et puis mon amie de l’époque m’avait dit : « Mais ce morceau, tu peux pas le donner il faut le garder pour toi ! ». C’est ce que je pensais de toute façon. J’en suis très content. J’aime beaucoup la progression harmonique, il y a beaucoup d’accords, c’est un peu expérimental, du point de vue harmonique en tout cas. Les voix qui passent, c’est un système que j’ai inventé : un chant tellement retraité qui finit par sonner comme un instrument. Je porte un masque pendant les concerts, je l’appelle l’effet dauphin. Il faut que cela soit « inhumain ». Pas dans le sens monstrueux mais plutôt comme quelque chose qui vient d’ailleurs. La voix ne doit pas sonner comme « humaine ». Et c’est le masque qui incarne le personnage de cette voix. J’ai vérifié sur internet, je crois que personne n’avait jamais fait ça avant. C’est mon invention, c’est cool.

L'effet Dauphin (c) Nadia Gric
On parlait de la précision de tes arrangements, ta musique est-elle difficile à retranscrire sur scène ?
YD : C’est un challenge. Il faut faire des choix. Pour beaucoup de morceaux, il y a vraiment un suspense avant de les aborder avec les musiciens pour la scène : est-ce que ça va marcher ou pas ? Jusqu’à présent ça marche, en général. Pour les morceaux important du moins. Comme « Let me be mine » ou il y a un truc de production important qui fait que ça monte tout le temps, crescendo. On a utilisé beaucoup de pistes en studio, je n’étais pas sur d’y arriver avec seulement cinq musiciens sur scène. Finalement, je suis très content de la version live. Et même d’ailleurs souvent, les gens qui découvrent la musique en concert me disent qu’ils préfèrent les versions live aux versions studio. Ca me fait plaisir mais ça m’inquiète aussi un peu. Quand les versions live sont réussies, tu as une énergie qu’on ne peut pas retrouver en studio. Mais il s’agit de deux choses distinctes dont le but est différent. Le disque tu vas l’écouter chez toi, tranquille, l’objectif n’est pas de faire hurler le public. Les versions live en revanche doivent être plus émotionnelles. Le concert c’est moment unique, plus violent.

Le concert c’est aussi une expérience…
YD : Personnellement c’est ce que je préfère. La musique que j’écoute quand je suis chez moi, c’est à 80 % des enregistrements en public. Quelque soit l’artiste. Et d’ailleurs quasiment jamais des live officiels. Des bootlegs trouvés sur internet. Quand je suis fan d’un artiste, j’écoute toute la tournée, je choisis mes versions préférées selon les concerts. Quand ce n’est pas retravaillé. Les versions live bootlegs ne sont pas celles qui ont été choisies pour être des versions live officielles. Tu entends le mec un peu fatigué, là tu as vraiment accès à l’artiste. Réellement, c’est ce qui m’intéresse le plus. Le concert c’est primordial. Mon but c’est un jour de faire une version live par chanson que je puisse considérer comme la version ultime du morceau, supérieure au studio. J’enregistre tous mes concerts. C’est aussi important de se réécouter pour pouvoir progresser. Il y a toujours un petit truc à trouver pour que cela marche de mieux en mieux. Surtout pour mes arrangements qui sont très précis.

Ta voix m’a rappelé Jeff Buckley, pour les montées dans les aigüs…
YD : Jeff Buckley, c’est un chanteur incroyable. Pourtant je ne l’ai pas beaucoup écouté. Il fait partie de ces « chanteurs pièges » quand tu es chanteur toi-même. A force de les écouter, tu vas reprendre leurs mimiques. Tu vas t’effacer à leur profit sans même t’en rendre compte. Et après pour s’en débarrasser… J’espère ne pas être trop tombé dedans. Il y a beaucoup de gens qui ont influencé ma façon de chanter. Buckley en fait partie, pour les montées dans les hauteurs. C’est de plus en plus rare d’exploiter ces registres « ténor » de la voix. Je ne sais pas pourquoi…

Il faut déjà en être capable déjà…
YD : Je pense que l’humain en est capable. Dans les années 60 et 70, surtout en Angleterre, il y avait des chanteurs qui allaient dans ces hauteurs là. Moi je trouve ça important. Il y a une sorte de vérité physique. Même si le mec devient ensuite une super star qui se la pète, en attendant, en concert, pour atteindre sa note, le gars est obligé de s’impliquer physiquement. Pour de vrai. C’est aussi une prise de risque, on est dans les extrêmes. Je sais que personnellement, je n’ai pas une grande marge de sécurité. Je ne vais que là où je peux aller. Suivant la forme physique. Ce qui fait que chaque concert est différent. Je suis dans un combat. C’est pour ça que les notes hautes m’intéressent, le challenge. Quand je l’écoute chez un autre artiste, il y a quelque chose qui me touche. C’est un peu comme le sport, un truc physique.

Revenons à ton travail en studio, quand la musique est autant travaillée que la tienne, il n’y a pas un risque de se perdre dans un dédale de pistes et de possibilités ?
YD : Si, si, ouais. Moi j’essaye de faire aussi concis que possible, de ne pas trop en rajouter. C’est à la fin que je remarque que c’est assez riche. En tout cas chaque arrangement est là par ce que je l’entends et pas pour faire tiens et si je rajoutais ça et ça. Au contraire de l’album précédent d’ailleurs. Dès que j’entendais une note c’est par ce qu’elle devait y être. J’essayais de respecter l’inspiration sans la brider. Là j’ai essayé d’épurer un peu sans tomber dans le truc avec juste une voix et une guitare. En tout cas je n’ai pas la sensation de me perdre. Mais ça peut être un piège.

Personnellement, j’ai eu besoin de deux, trois écoutes pour vraiment rentrer dedans. J’ai été un peu déstabilisé au départ…
YD : Oui, c’est vrai qu’il y a pas mal d’arrangements mais il y aurait pu en avoir beaucoup plus…

(c) Nadia Gric

Un petit mot sur la reprise des Beatles, « Oh Darling » ?
YD : J’aime bien faire des reprises en général, c’est un peu mon école. C’est comme ça que j’apprends en reprenant des choses qui ne sont pas forcément dans mon registre. Quand tu chantes que tes propres compositions tu ne vas pas avoir accès aux idées des autres. Je joue toutes les semaines des reprises dans un bar. Je ne communique pas dessus, j’en ai besoin pour la gym vocale, pour tester de nouvelles techniques de chant. « Oh darling » était une de ces reprises. J’ai fait un peu comme sur mon premier album, j’ai adapté la chanson en mineur. Ca peut paraître un peu scolaire mais c’est une émotion très concrète. Ca apporte de la noirceur, de la profondeur. Ca se prêtait bien à cette chanson, qui n’est pas très connue. C’est aussi un de ces moments où McCartney se déchire la voix sur des paroles un peu blues, un peu bateau, genre « tu m’as quitté, je vais mourir etc… ». Je me suis dit que sans ces influences blues, le titre prenait une autre dimension, assez intéressante à écouter. J’étais content du résultat alors je l’ai gardé. C’est une reprise à la base c’était plus pour faire un exercice. Une curiosité, je voulais le tenter. Et puis les reprises c’est un truc qui se fait beaucoup de nos jours, peut-être un peu trop d’ailleurs, mais bon une seule ça va. Un album de reprises, ça ne serait pas un vrai album. Et puis beaucoup des reprises que j’entends en ce moment, c’est en fait des versions modernes auto-tunée. Quoi qu’il en soit, ça dénote un manque d’inspiration. Dans l’album il n’y en aura pas deux, c’est sur.

On qualifie souvent ta musique de « cinématographique », je pense notamment à « Stand by me » qui est un peu western. Ca te plairait de travailler pour le cinéma ?
YD : Ca m’est déjà arrivé quelquefois. J’ai plus fait l’acteur alors que je ne suis absolument pas comédien. Mais comme on me le proposait. Faire de la musique pour le cinéma, oui ça me dirait bien. Tu n’es pas le premier à me faire la remarque concernant l’aspect cinématographique de mes morceaux. Ce n’est pas intentionnel. C’est difficile d’expliquer pourquoi…

On sent qu’il y a un climat, une ambiance dans tes chansons…
YD : Dans ma tête une chanson c’est souvent comme une scène, quand tu décris quelque chose qui se passe. La chanson c’est un moyen de communiquer une émotion, une situation.

Pourquoi avoir fait le choix de chanter en anglais ? C’était évident, compte tenu de tes influences ?  
YD : Ce n’est pas un choix idéologique, au contraire, je trouve que c’est très bien de chanter en français. En fait je crois que je n’ai pas tellement le choix. Mon père était très mélomane, sa passion c’était d’écouter de la musique, il n’en faisait pas. Beaucoup de groupes anglo-saxons. Et du coup, quand je compose aussi bien la musique que les textes, c’est beaucoup dans cette veine anglo-saxonne. J’aime beaucoup certains français mais qui eux-mêmes ont beaucoup piocher chez les anglais : Polnareff, William Sheller, Balavoine, Gainsbourg. Et puis je trouve qu’il y a un talent et une sensibilité musicale particulière chez les anglo-saxons qui me touche plus que la tradition française. Nous on n’est plus dans les textes et la qualité d’interprétation. J’essaye de prendre ce qu’il y a de mieux dans l’un et dans l’autre, la sensibilité musicale des Beatles, la qualité d’interprétation de Jacques Brel.
  
Et chanter en français ?
YD : Ca m’est arrivé. Ca dépend de l’inspiration. J’ai fait un morceau en français par ce qu’il m’était venu comme ça. Il n’est jamais sorti, je ne sais pas trop quoi en faire. C’était dans ma période « maison de disques ». On aurait pu croire qu’ils me le demandaient, ils le faisaient d’ailleurs, mais c’était là par hasard. J’ai hésité à le faire. Ils insistaient tellement que si je leur montrais que je savais écrire en français, j’allais tomber dans une sorte de piège, condamné à chanter en français. Ca fait partie des choses qui font que je suis content de ne plus être en maison de disques. On avait fait un clip d’ailleurs mais qui n’est jamais sorti, encore pour des raisons propres au système…

Peut-on qualifier ta musique de psychédélique ?
YD : Ca ne fait pas un peu drogué ?

Je pensais surtout au rock de la fin des années 1960…
YD : Moi j’adore. Ce n’est pas le seul style de musique que j’écoute. C’est vrai qu’il y a un côté un peu « space », déconnecté de la réalité, qui veut voyager dans l’imaginaire. Un peu science-fiction. J’aime bien ce côté-là, onirique.

Ta bio indique que tu es détaché des modes et des formats…
YD : Je suis bien obligé de le constater. Je suis assez peu référencé, très peu relayé par les médias. J’aimerai bien trouver une place dans le système, un public. Mais c’est vrai que je n’aime pas les modes, je ne regarde plus la télé. Il y a une sorte d’endoctrinement de la pensée que je trouve dangereux. J’essaye de me rappeler qui je suis. Depuis que je ne regarde plus la télé, j’ai l’impression d’avoir une pensée plus large, d’après mon propre ressenti, plutôt que d’avoir le choix entre deux avis. Je suis hors-format.

Propos recueillis le 13 juin 2012.
http://yanndestalmusic.com/index.html

jeudi 7 mars 2013

Caroline Lacaze : « L’étrange »





Repérée récemment sur le dernier album des Mighty Mocambos (qui en leur temps accompagnaient Gizelle Smith), Caroline Lacaze réussi cet exploit inespéré faire groover la langue française. Rencontre entre la chanson et un accompagnement musical digne du meilleur de la soul contemporaine (les labels Daptone et Truth & Soul), le premier quarante-cinq tours de Caroline, « L’étrange » porte bien son nom. Le résultat est terriblement excitant. Le premier album de Caroline Lacaze, « En route », est prévu pour le mois prochain. Affaire à suivre…

mercredi 6 mars 2013

Smoove : « First Class »




Du jazz aux sonorités latines, en passant par le funk ou la soul, c’est à un joli voyage musical que nous convie Smoove. On peut toutefois regretter le parti pris de production club qui tend à niveler le tout et à gommer la formidable finesse rythmique de la musique. Il y a de tout façon peu à attendre d’un album de remixes, si ce n’est de fournir de la matière pour danser le samedi soir. Mission réussie haut la main en l’espèce. 

mardi 5 mars 2013

Lily after midnight : « These are strange days »




Lily after midnight, projet bien français comme son patronyme ne l’indique pas, porte bien son nom. Acoustique, délicat et mélodique, les six titres de cet ep sont tout indiqués pour une écoute nocturne. Lily pratique l’intimité musicale et enregistre en petit comité, de la guitare acoustique, du violoncelle et un piano de temps en temps. C’est peu mais en l’espèce c’est parfait, soyeux. Il n’en faut guère plus pour que la magie opère et mettre en valeur le timbre délicat de Lily. Seul petit reproche, certaines compositions n’auraient pas souffert d’être plus courtes. Un univers très féminin qui ravira les romantiques aimant rêver en musique.

dimanche 3 mars 2013

Adieu Daniel.





Je suis triste. Profondément triste. Daniel Darc a été retrouvé mort dans son appartement parisien le jeudi 28 février 2013 à l’age de 53 ans. Durant sa carrière débuté à la fin des années 1970 au sein de Taxi Girl, Daniel aura connu quelques hauts (grosso modo « Cherchez le garçon » en 1980 puis à partir de l’album « Crève cœur » en 2004) et beaucoup de bas. Très, très bas. Daniel avait survécu à un nombre incroyable d’overdoses et s’étonnait encore de n’avoir jamais contracté le sida, comme par miracle. A la fin, on l’imaginait solide comme un roc, indestructible. Et tellement fragile en même temps, dramatiquement humain. Romantique. Ecorché. Sur scène Daniel faisait preuve d’un investissement sans limite, comme on a pu le voir à l’Olympia en 2008. Tellement intense, qu’il pouvait quelque part mettre mal à l’aise. Comme il le chantait dans son chef d’œuvre « Nijinsky » (sorti en 1994, le disque est aujourd’hui scandaleusement introuvable) : « N’ayez aucun remord, le jour de mes obsèques, au-dessus de mon corps, Dieu dansera avec ». Adieu Daniel, repose en paix.

Daniel Darc - Nijinski par chubbydebu

samedi 2 mars 2013

Portrait Edwyn Collins.




L’image est forte et émouvante, limite choquante. En cette fin d’après-midi, un vendredi d’hiver, Edwyn Collins, l’auteur du tube « A girl like you » en 1994, sort péniblement d’un café situé sur le boulevard Saint-Michel. Victime d’un AVC en 2005, l’homme est depuis hémiplégique, cet épisode dramatique fera bientôt l’objet d’un documentaire. Son bras droit reste désespérément bloqué, il peine à se mouvoir, marche à l’aide d’une canne et a parfois du mal à s’exprimer. Ce qui ne l’empêche pourtant pas d’être extrêmement volubile. Prévue pour durer une demi-heure, l’interview s’est finalement étalée sur une durée double. Sa dévouée manageuse, Grace, veille sur lui avec soin. On s’en doute et l'ex-leader d'Orange Juice l’admet bien volontiers, l’épisode entier à changé sa perspective sur sa vie : « Je suis beaucoup plus relax. Je profite de l’existence. Tranquille. Le fils d’un vieil ami à moi, dans mon petit village d’Ecosse, a essayé de se suicider. La dépression tu comprends, c’est sérieux. Je suis allé le voir, je lui ai dis : mais pourquoi t’as fait ça ? Ne recommence plus jamais, la vie est précieuse ! Il m’a dit : oui Edwyn ». Collins affiche un sourire satisfait. « La vie se joue au hasard » reprend-t-il. « Regarde Grant MacLennan (ancien membre des Go-Betweens, décédé d’une crise cardiaque en 2006) il est mort comme ça du jour au lendemain. Après l‘attaque je me suis senti renaître. Je suis heureux, j’adore ma vie. C’est juste génial d’être ici ».  


Edwyn Collins n’a pas pour autant tiré un trait sur sa vie professionnelle. Un nouvel album « Understated » sort ce mois-ci, « mon deuxième depuis l’accident. Déjà. C’est incroyable ». Et s’apprête même à reprendre la route. Le chanteur est également producteur (deux albums avec Little Barrie notamment) et possède même son propre label : AED qui signifie Analogic Enhanced Digital, « une blague que personne ne comprend », se marre-t-il. « On a sorti cinq disques sur ce nouveau label. Tu vois à 19 ans j’avais déjà mon propre label Postcard records. Voilà la boucle est bouclée ». Si Edwyn ne peut plus, hélas, jouer de la guitare, il chante toujours. Mieux que jamais même. Son timbre de crooner fait des merveilles sur ce nouveau disque. « Oh oui, j’ai toujours été un crooner. J’adore Iggy Pop. Sinatra a eu une influence énorme sur moi ». Enregistré avec l’aide de quelques amis, Paul Cook, l’ex-Sex Pistols à la batterie et Barrie Cadogan, « un guitariste extraordinaire », ce nouvel album est excellent.


Rien de tout cela n’aurait été possible sans le succès phénoménal et mondial rencontré par « A girl like you », son tube de 1994. « La chanson est plus célèbre que moi » rigole-t-il, ce qui semble être confirmé par les faits ; depuis une heure les touristes vont et viennent dans le petit hall d’hôtel sans que personne ne semble lui porter la moindre attention. « Je ne regrette absolument rien de ce titre. Cette chanson m’a fait vivre depuis des années. Le succès est arrivé assez très tardivement, j’avais déjà trente cinq ans à l’époque et plus de 15 ans de carrière, je n’ai pas pété les plombs. J’étais déjà très cynique, sarcastique concernant le business à cette époque. Avant j’étais signé chez Polydor. Le chef de projet avec qui je travaillais, c’était n’importe quoi. Un jour il me disait de faire de la soul music. Le lendemain, je devais devenir gothique et plagier les Cure. J’ai vite compris que si je voulais continuer, il fallait que je construise mon propre studio et que je contrôle tout du début à la fin. C’est ce que j’ai fait. Le premier album que j’ai enregistré en étant propriétaire du studio c’était « Gorgeous George » (et la fameuse chanson « A girl like you ») qui a été un succès phénoménal on a eu de la chance. Ce succès a été un cadeau, cela m’a permis de rester libre, d’expérimenter. Depuis je suis un peu en marge du business musical. Et franchement ce n’est pas une mauvaise place. Je regarde les autres s’agiter et moi je fais mon truc dans mon coin. Et même si aujourd’hui je passe pour un « one hit wonder », le type qui n’a réussi qu’une seule chanson dans sa vie, c’est plus que la majorité des gens ne peuvent espérer ».  

Propos recueillis le 1er mars 2013.

vendredi 1 mars 2013

La Mauvaise Voie, Théâtre le passage vers les étoiles, 28 février 2013.




Alors que les lumières s’éteignent et que résonnent les premières notes de piano, le silence se fait dans la salle. C’est parti pour le grand voyage dans le temps. Nous sommes dans les années 1960 et alors que la France s’industrialise, cette chose étrange appelée « l’autoroute » fait son apparition. Deux caractères s’opposent la folle Vémina (jouée avec conviction par Laura Woody, par ailleurs membre des Barettes) qui a pour ambition de tout détruire et de dominer le monde et la vaillante équipe du Macadam, petit cabaret dont le plus grand malheur est de se trouver sur le chemin de ladite autoroute, bien décidée à ne pas se laisser exproprier...

Si le sujet peut paraître grave, la pièce ne l’est absolument pas. Fun et légèreté sont ici les maîtres mots. Sur une bande son jazz et pop, intégralement jouée en live par une excellente pianiste, la jeune troupe joue danse et chante avec entrain. Les chorégraphies sont un enchantement et l’ensemble du casting donne de la voix avec talent. Les costumes ont été choisis avec soin et même le décor, pourtant spartiate et minimaliste possède ce petit charme suranné. La pièce toute entière est portée avec une énergie communicative par son casting de jeunes acteurs. Allez les voir, c’est l’assurance de passer un moment drôle et, au final, une bonne soirée.
Théâtre Passage vers les étoiles, 17 cité Joly 75011 Paris.
Prochaine représentation le 21 mars 2013 (21h00)
Réservations au 09 50 00 60 17
http://www.billetreduc.com/85053/evt.htm
Retrouvez la mauvaise voie en juillet prochain lors du festival d’Avignon.