samedi 2 août 2008

Let’s get lost de Bruce Weber

Le documentaire de Bruce Weber, l'un des rares longs métrages du photographe, consacré au jazzman Chet Baker, bénéficie d’une discrète ressortie cet été. C’est tout simplement l’un des plus beau et émouvant film jamais consacré à la musique.

Au début du métrage, filmé dans un noir et blanc somptueux, Chet Baker est un véritable adonis. Beau gosse, belle gueule, pétri de talent, excellent trompettiste et doté en plus d’une belle voix, qui vocalise presque aussi bien que Roy Orbison. Le James Dean du jazz. Le parangon d’une certaine forme de jazz cool, typiquement West Coast, évoquant un Los Angeles romantique à souhait, une Californie qui n’existe plus maintenant. Dans une des toutes premières scènes du film, dans un studio d’enregistrement, on y croise un Chris Isaak débutant véritablement impressionné d’être en compagnie d’une légende vivante. Puis Chet Baker change, embarqué dans un enfer cocaïné. L’histoire d’une déchéance.

Interrogé face à la camera, Vera Baker, la maman de Chet est au bord des larmes :
« Votre garçon est un brillant musicien et a gagné de nombreux prix. Mais vous a-t-il déçu en tant que fils ? »
Le silence est lourd, pesant. La réponse est sans appel :
« Oui. Mais je n’ai pas envie d’en parler… »

Chet Baker est ainsi. Usant de son charme et de ses bonnes manières pour carotter tout son entourage, prêt à tout pour se payer sa dose. Et se mettre finalement pratiquement tout le monde à dos. Et le film de raconter comment il s’est fait casser la gueule, et toutes ses dents, à San Francisco, à la suite d’un deal qui a mal tourné. Comment il a du réapprendre à souffler dans sa trompette avec un dentier, ce qui l’a éloigné de la scène pendant de longs mois. Et les seize mois de prison passé à Lucques (Italie) après s’être fait arrêté en train de se faire un fix dans les toilettes d’une station service.




A la fin du film, Chet Baker n’est plus que l’ombre de lui-même. Ridé, les joues creuses. Il n’a plus rien du jeune premier des débuts. Affalé sur la banquette arrière d’une Cadillac entouré de jolies pépées, la vie n’a pourtant plus l’air aussi belle. Pourtant, inexplicablement, son talent est intact, sa voix, son jeu de trompette n’a pas bougé d’un iota. Malgré tout, il accuse le poids des excès, bouge lentement, a du mal à s’exprimer, cherche ses mots. Ses phrases sont ponctuées de longs blancs évocateurs :

« Chet, quand tu reverras ce film, dans quelques années, est-ce que cela restera un bon souvenir pour toi ? »
« Oui, comment pourrait-il en être autrement. »

Pourtant Chet Baker ne verra jamais le film, tourné en 1987. Sa trajectoire se termine dans une flaque de sang, sur un trottoir d’Amsterdam, après une chute dont on ne saura jamais si elle fut accidentelle ou non. C’était le 13 mai 1988. Et ce soir là, tous les clubs de jazz de Paris, qu’il avait bien connu, sont restés silencieux. Il avait 58 ans. Il nous reste la musique et si j’ai un seul conseil à vous donner c’est d’écouter d’urgence son album « Strollin’ ».


La bande-annonce :

2 commentaires:

saab a dit…

Hello Régis,

Tu vas te moquer de moi mais je n'ai pas encore eu le temps de me pencher des Miles Davis ou Chet Baker... ah si les journées pouvaient s'allonger mais je vais remédier à cela.

En ce qui concerne les libellés
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@ + sabine

My Head is a Jukebox a dit…

Merci Sabine pour ces précieux renseignement, je vais faire cela ce soir.

A+
Régis