samedi 19 janvier 2013

Interview avec Séverin




Un an et demi après une première rencontre, retrouvailles avec Séverin, dans le superbe cadre du café Delaville. Ce dernier accepte de revenir sur la renaissance de son premier album et se livre sans fard sur ses diverses sources d’inspiration, parfois de manière très intime…

La dernière fois qu’on s’est vu, l’album s’appelait « l’amour triangulaire » et depuis tout à changé, que s’est-il passé ? Etait-tu frustré par la première mouture du disque ?
Séverin : L’amour triangulaire est sorti en numérique et devait sortir en physique. Ca correspondait jusqu’au moment ou je travaillais sur de nouvelles chansons et je trouvais que l’album n’était pas tellement abouti dans le sens qu’il manquait beaucoup de choses de ma personnalité qui n’était pas dans la première version du disque. J’ai demandé qu’on arrête le processus. Je voulais inclure de nouvelles chansons pour que le disque me ressemble plus sur plus de facettes. Je voulais accorder plus d’importance au fond plutôt qu’à la forme.

Quelle comparaison tu ferais entre les deux versions du disque ? Quelles facettes as-tu voulu rajouter ?
Séverin : Il y a des choses plus personnelles, nostalgiques et sentimentales. C’est ce qui manquait pour moi dans le premier. J’étais plus en colère à ce moment là. Je voulais quelque chose de plus triste. La colère reste toujours mais d’une manière polie.

Moi je l’ai trouvé la nouvelle version plus sombre, plus nostalgique et aussi moins rock. Tu n’as jamais été dans un registre rock pur mais il y avait quand même cette énergie…
Séverin : Oui, il y a peut-être un peu moins de guitares mais ça vient aussi des conditions d’enregistrement des nouvelles chansons. J’ai beaucoup moins joué en groupe. Dans le premier il y avait une vraie énergie de groupe alors que là c’est moi qui joue un peu tous les instruments.

Pourquoi tu n’as pas gardé « mini bar » ?  J’aimais bien ce titre assez dépouillé par rapport au reste avec simplement une guitare et une voix, et ça apportait une nouvelle facette assez intéressante de ton univers artistique…
Séverin : Le choix des titres était dur. Mini bar… (long silence). Je pense que dans ce genre d’ambiance et de sentiments, j’avais mieux. Le morceau existe, on peut toujours le trouver mais je le trouvais un peu redondant par rapport à d’autres chansons. Je n’aimais pas trop le son de guitare en fait (sourire).

Tes paroles sont d’une manière générale assez intimes. Tu n’as pas peur de te mettre un peu à nu ?
Séverin : Pour l’instant je suis dans un système plutôt agréable : mes chansons me ressemblent et les gens qui écoutent ma musique en général comprennent mon propos et ne le déteste pas. Je n’ai pas de commentaires ou de jugements négatifs sur ma personnalité. C’est le risque quand tu fais des albums très personnels. C’est toi, ta personnalité que l’on juge et commente. Mais je n’ai pas eu à y faire face. Peut-être à l’avenir (sourire). En tout cas moi je suis content d’avoir fait ce disque. Plus je parle de moi, plus je me rends compte que d’autres personnes se reconnaissent dans mes titres. Ca me fait plaisir. Tu prends « Dans les graviers » par exemple, j’ai reçu des mails à propos de ce titre de personnes qui comprennent exactement de quoi je parle. Ou « première déclaration », une chanson hyper frontale, hyper personnelle, je pense que ce genre de titre peut avoir un écho beaucoup plus fort chez les auditeurs. Contrairement à une chanson qui parlerait d’un sentiment global d’une manière évasive, là c’est quand même très précis. Mais bon c’est vrai que c’est risqué, tu peux te retrouver jeté en pâture…

Et cela ne te fait pas peur ?
Séverin : Non. Tant qu’on ne me traite pas de gros con, ça va…

Est-tu quelqu’un de nostalgique ? Je pense en particulier aux paroles de « Dommage collatéral » ou « Dans les graviers »…
Séverin : Je pense que j’ai un tempérament assez nostalgique mais je crois qu’en même temps je suis un mec assez heureux. J’ai des gênes plutôt sain, je suis de bonne composition, j’arrive à me relever d’à peu près tous les petits trucs qui peuvent m’arriver. Je sens ma nostalgie dans ma voix et mes chansons mais dans la vie de tous les jours, je ne suis pas le genre à dire que c’était mieux avant. Je ne le pense pas tellement d’ailleurs, je suis content de vivre dans mon époque, tout va bien. La nostalgie me vient un peu malgré moi.

Quelques mots sur les paroles de « Sexplication » ? Dans la limite du raisonnable bien entendu.
Séverin : Alors, écoute (rire un peu gêné). Sexplication, euh… C’est déjà un sujet qui me tenait à cœur, ça fait longtemps que j’avais envie de faire une chanson là-dessus. C’est le genre de thématiques ou tu es obligé d’avoir une musique fun sinon ça peut vite devenir un peu sordide. C’est difficile de réussir à garder longtemps une relation érotique dans un couple. C’est aussi pour parler de la mauvaise foi des garçons. C’est un peu toujours l’autre alors que lâcher le romantisme trop vite, c’est souvent un truc de mec.

Dans « les sirènes » il y a une phrase qui dit : « C’est la ville qui m’a crée ». Parle-nous un peu de la ville…
Séverin : J’ai passé énormément de temps dans ma jeunesse dans les bureaux de mon père, à l’attendre dans un environnement hyper-business. J’ai le sentiment que le lycée ne s’arrête jamais en fait. T’as l’impression d’être dans un lycée qui s’agrandit et s’agrandit avec des enjeux qui sont toujours de plus en plus grands. Le terme « ville », c’était plus la formulation d’un truc oppressant.

La chanson était déjà sur l’amour triangulaire, c’était le dernier titre, est-ce qu’il y a une signification particulière ?
Séverin : Déjà j’étais assez déprimé au moment où je l’ai écrite. Et même temps je jouais avec cette idée d’être déprimé. C’était une blague mais il y avait un côté un peu sentimental quand même. L’idée d’être piégé entre deux choses. Mais quand je l’ai faîte, je me disais, et ça m’arrive de temps en temps, « mais qu’est-ce que je fous, je ferai mieux de me trouver un vrai boulot plutôt que d’essayer de faire de la musique »… C’est un combat perpétuel de faire de la musique, c’est vrai dans des milliers de jobs et j’ai beaucoup de chance malgré tout. Mais il y a ce truc qui fait que tu luttes tout le temps contre toi-même. Des fois j’en ai marre de devoir tout le temps être créatif, c’est dur d’avoir tout le temps de nouvelles idées. C’était un de ces jours là.

Tu doutes beaucoup ?
Séverin : A fond, il y a des jours où je me dis que je suis une grosse merde. J’espère que beaucoup de gens se le disent également. Je le pense, je l’espère en tout cas. C’est assez sain finalement. Mais il y a des jours où je me dis aussi que je suis un génie ! Je te rassure (rires) !

Tes chansons reposent sur un équilibre assez subtil entre paroles mélancoliques et musiques plutôt fun. Comment trouves-tu la bonne balance ?
Séverin : Subtil, c’est le mot. Ce n’est pas un choix. La musique et les paroles sont d’égale importance. J’essaye de ne pas me laisser aller à la facilité concernant les arrangements. C’est pour cela que je réalise des disques pour d’autres gens à côté. Cela me tient à cœur. Il y a des choses que je m’interdis, cependant, des choses mille fois entendues. Les automatismes viennent facilement en ce qui concerne les rythmiques, basse, batterie. Il y a trucs bateau que je veux éviter.

La dernière fois qu’on s’est, tu étais enfermé dehors, t’avais oublié tes clefs. T’as de nouvelles mésaventures à raconter…
Séverin : Ah oui, les clefs je ne les toujours pas récupéré mais ça va, je me suis arrangé (rires). J’ai un chat chez moi maintenant. En fait j’ai enfermé un chat sans le savoir. Je ne savais pas qu’il y avait un chat dans cette pièce et je l’ai enfermé pendant 20 jours. Je l’ai trouvé 20 jours après, parce que je ne savais pas qu’il était là et il était en train de mourir. Il faisait 1,2 kilo. La pièce où elle était elle avait gratté toutes les portes et le fenêtres jusqu’au sang. Elle a vécu deux semaines et demi sans eau et sans manger sauf des balles de ping pong. Et maintenant elle a deux ans et elle est à la maison. Elle s’appelle Natacha comme Natascha Kampusch, la fille qui s’est fait séquestré par ses parents. Une histoire sordide. Maintenant elle est en parfaite santé et elle me réveille tous les jours à six heures et demi du matin. Elle s’assoit dans mes cheveux. Une autre anecdote de portes…

Propos recueillis le 18 juillet 2012.
www.facebook.com/iciseverin

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